Poésie au présent permanent - Des écrits au jour le jour - 2016
LE MARIN POETE
Jouer avec toutes choses au fil de l’eau
Voir de l’œil magique sous grand vent
Accepter les bienfaits du firmament
Connaître par cœur le langage des bateaux.
Rappeler à la belle mémoire, une heure d’été
Prédire le crépuscule à travers la campagne
Couvrir les méditations d’un équipage de pagnes
Ancrer dans le port toute ombrée chahutée.
Sourire dans le jardin haut dans le ciel
Traduire l’enchantement de la légende dorée
Créer c’est une volonté, une force, une quête zélée
Pour chanter la vie du théâtre de l’oriel.
***
LE ROUGE ANDRINOPLE
Le rouge andrinople sur le tissu écossais
La colombe au salon sous les soirs d’orage
Une tapisserie feutrée, un cachemire imparfait
Le costume du magasinier a traversé tous les âges.
La fibre est régulière comme un mouchoir de batiste
Le matin au soleil joue le temps de sa broderie
La fougère calibrée en pochoir de la vie
Fractale vestimentaire de l’argentier chimiste.
Une chose de beauté pour toute joie éternelle
La nuance la plus tendre en majesté
Le sceptre sur le champ des serments listés
La lune noire tire sa révérence maternelle.
***
LE ROMAN DU TEMPS PRESENT
Le temps présent sait jouer grand jeu,
A la bonne date, les premiers feuillets écrivent le roman
Célébrant le rêve en vélin crème, bienheureux,
L’expérience intérieure gravée dans la pierre, probablement.
Le don d’amour du libraire à son auteur,
Une valeur infinie, l’ami zélé du langage,
L’archéologie minimale de son état intérieur,
Les ombres dominantes au cœur léger, un mirage.
Un autre sens signé à la plume d’une tête dorée,
Tout au long de l’ouvrage tapissé de sagesse,
Réservé à l’auteur, une métaphore de la vie, une goutte de rosée,
Assez pour entendre dans tout mot, l’or et son adresse.
A ce soir, au couchant de l’instant, disent les lignes
A l’école du présent, on apprend son époque,
L’esprit probable, explorateur, sait faire signe,
Fac -similé, l’air ébahissant, errant en soliloque.
***
SOLEIL
Le soleil se fit plus haut, étrillé des temps anciens
Sur le sentier de bois, les hêtres, solides terriens
Ce n’était pas un rêve, en cette lune de félicité,
Le chemin de silence vint à sa rencontre, en affinité.
Le vent des âmes ne se vit pas dans la volonté de s’épanouir,
Calme en conscience, il eut l’art de dire,
La maison du rivage les accueillit en juillet
En fille avisée, elle sut écouter la lumière du passé.
***
AU COIN DE LA RUE
Une lampe en rond au coin de la rue,
Echelle en croix, étoiles en danse, colonnes en chahut,
Etamine en serpentine, anneau en dialogue noir,
Au globe de dentelle, elle préfère le miroir.
Le bateau du corsaire en vagues de drapeaux violets,
Roseaux en marge à la frontière du palais,
L’ombre des palmes en fanions damassés
La serrure de la malle à jamais verrouillée.
La carte navigante au bosquet de la maison
La cheminée rouge en costume de maçon,
Le pré vert en jonquille, en nénuphars à la rose
Danse des étoiles sur le compartiment des osmoses.
Le collier de l’arbre trace la procession
Un repas de marguerites au dîner de l’union.
***
Alchimie
Expliquer une épreuve de vérité
C’est comme décider de fermer les jalousies
Pour que des sciences tous les secrets
Puissent s’opposer à l’ennui.
Exposer ses recherches au soleil
C’est comme vouloir interdire la réponse
Pour que les ondes dans leur sommeil
Rêvent d’or, en grammes, en onces.
Informer la lune de sa révolution
C’est comme vouloir avilir le grandiose
Pour que les atomes, les ions, les protons,
Cessent de jouer à l’enchanteur qui ose.
***
Nuit de noces
Un sourire dans un éventail de larmes
De celui qui suspend les dangers
Quand silencieux, fondant en son âme
Comme la lave dans la mer Egée.
Un visage nu maquillé de satin
Pour émerveiller le jeune ahuri
Une nuit volcanique étouffée du matin
Traces jalouses sur les chastes broderies.
Un regard à étonner les amours vaincues
De celui qui éloigne les regrets
La jeune femme a tué l’ingénue
Mais grince entre ses dents qu’il n’aura pas sa liberté.
***
La transparence de la brume vint interroger l’homme
Placide comme le charretier aux guides sensibles
Pour lui demander quoi ?
Un reflet sur une soie imaginée du matin.
Au pied de l’observatoire questionnant le ciel.
Qui lui répondit quoi ?
Seul le silence des nuits fera naître l’espoir d’une réponse.
***
Le poète n’utilise jamais une encre déserte
Elle souffle toujours un vent habité
De la folle passion qui tue la bluette
Sous le désir pourpre d’une nuit d’été.
Les songes chuchotés au pied de la fontaine
Sous les ramures du cèdre centenaire
Trop larges pour le décor, pour la mise en scène,
La toile de fond chahutant l’atmosphère.
Les murmures du roi et de son fils languissant
Au destin lié à un crâne, à une sphère
Sur les bords de l’Avon, sur le fleuve glissant
Gravent le sceau de leur argile amère.
***
La surface historiée
Bleue comme une crique miniature
Droite comme un phare à la fenêtre
Douce comme des grillons en costume d’alpaga.
L’oiseau vogue dans la transparence du cristal de la plage
L’esthétique des grands pavois
A l’exposition des voiles de lin
A la barre aux coutures d’ajoncs
Au coussin d’hiver en mousseline
L’oiseau vole sur les tableaux de galets.
La folie vague des couleurs
Le style des confusions aux illusions,
De la galerie des coquelicots en caraco
L’oiseau voit naître de son nid des tissages de quartz.
***
A l’abri du monde
Cela arrive toujours à l’abri du monde
Quand les vitraux des églises
Et les ombres des hauts rochers
Annoncent dans un figuré de réalité
Que les temps sont venus
Pour les druides des archipels
D’orner de dimanches les couleurs de la ville.
***
Midi en avril
Midi règne sur la mer
Avril naît d’un sillage d’écume
La frontière italienne se rapproche
Dans un nuage de sable sur la Riviera.
Un rayonnement aveugle l’horizon
Une illumination comme le faisceau d’un réverbère
C’est un jour très calme
Sous le riche parfum du destin et du temps.
***
Les mots ne volent pas dans l’air immobile
Ni ne voguent au rythme salé des vagues
Ni n’ornent de soleil les lustres des châteaux
Pas même les plus jolis du monde.
Les mots ne parlent pas aux paysages familiers
Ni ne coulent le long des torrents
Ni ne tombent dans les abîmes sans fond
Pas même les plus profonds du monde.
Les mots ne pâlissent pas la nuit
Ni les épais brouillards des falaises incertaines
Ni sous les éventails des étés à l’Escurial
Pas même les plus mystérieux du monde.
Les mots ne tombent pas verticaux
Ni sous les cascades, ni par-dessus les océans
Ni des clochers, ni des ponts, ni des hôtels
Pas même pour se taire.
***
Des grains bleus roulés par les vagues
Des forêts de mâts, des tissages de haubans
Un rayonnement de flots calmes
Règnent immobiles en matinée.
Où est le poète ?
Demandent les fleurs silencieuses.
Il récompense la vie
Répondent en chœur Harmonie et Fantaisie.
Peut-il se jouer de toutes choses ?
Au fil de l’eau, sous le grand vent
L’œil magique n’y voit que merveilles
Et se régale de bienfaits.
La mer est belle vue du rivage…
***
La mémoire a ses jardins
Des îles, un horizon, des soirs bleutés
Au jour tombé, elle se replie, elle se couche
Sur les rivages d’un oubli programmé.
Et d’autres soirs
Cherchent la clé d’un sommeil sans lune
Regardent dans les yeux le gel face au soleil
Creusent le silence sur les terres polies.
Des quatre coins de la Terre
Les vents passent sur les abris
Courent les rues, les campagnes, les demeures
Quand tombent les étoiles de la nuit.
***
Ah ! La belle mémoire
Qui résonne à l’heure proche du crépuscule
A travers les campagnes
D’une lointaine méditation
Un équipage de chuchotements.
Ah ! Quand le jour se lève tard
Quand ancré dans le port
Sur le bon sable, à l’ombre des voiles
L’apparence du soleil
La force étoilée de la nuit.
Ah ! L’enchantement des sentiers de la mer
Tradition en Cornouailles, les contes mystérieux
Une façon de faire venir le vent
Une légende dorée.
La mythologie des gens des côtes.
***
Au pays des chemins sur la mer
La tradition est celle de l’enchantement
Faire fi de l’apparence du soleil
Pour les gens des côtes,
La nuance est capitale.
Le zéphyr et ses légendes dorées
Ne soufflent pas en pays de Cornouailles
Mais ils savent comme personne
Faire venir le vent.
En dehors des mers
Et des histoires de vent debout
Sous la face étoilée de la nuit
La vie est ce conte venu tout droit de la mythologie.
***
Comment s’entendre sous les gouttes
D’un concert, des embardées, des courants, des marées, de sons d’or.
Savoir que l’harmonie joue sa vie sur tapis rouge ou vert
Quand face au violon cherche à s’imposer le cor.
Sonne, résonner ou mugir, frapper, vrombir, ou pleurer.
Les cordes blanches, les cuivres noirs se moquant des marteaux
Guerre fratricide d’outils sonores ensorcelés.
***
Proche de tout pour se rapprocher de soi
Intemporelle proximité des lieux
Survivance des pierres
La vie est un vagabondage disponible, une promenade éperdue, des souvenirs survivants,
D’histoire accessible.
Partout chez soi, amusée et proche de la vie, de sa proximité.
***
Le rivage pour toute barque
Le sable bleu pour accueillir la lumière
Un repos avis assis sur la plage
Le spectacle d’un voyage
Libre comme le verbe du renouveau.
***