TIRADE Une côte sous la lune, la chapelle en
TIRADE
Une côte sous la lune, la chapelle en tempête,
La nuit proche de la falaise dans sa droiture
L’âge en mains, le phare sur la lande, des nuages en tête
Les cailloux alignés en pièce unique, mimant d’un prince, la stature.
Des tréteaux tranquilles sortent de petites notes,
La trame de la requête d’écrits en multiples pliages
Je veux savoir dit l’acteur, la mémoire en anecdotes,
Frénésie d’Elseneur, château en élégance, éventail en camouflage.
Toutes les ressources de la mer et des pierres
Font plaisanter la raison pour faire le point
Sur la grille de fer forgé du théâtre d’hier
Les bougies allumées pour embellir les instants, des témoins.
Il est toujours temps de jouer Hamlet, sur le champ
Vous permettez, dit-il, assis sur le bureau en acajou, racontez ce que vous avez fait,
L’activité de cette journée enthousiasmante, un soupir délicat, un miroir, une mise en scène du temps,
Le meilleur de l’histoire tient dans un éclair prudent, un souffle, une tirade au sommet.
***
LA PLUIE
Un parapluie de perles de pluie en pampilles
Un ruban rouge de roses en ribambelle
Des coquelicots couronnés claquant leurs vermeilles coquilles
Une lande lumineuse délaissant la mer, plénitude précieuse comme le ciel.
L’existence est doctrine de connaissance
Sur le registre autonome de la materia prima,
Symbole de pureté, l’écrivain invente le cercle de la semence,
De nouvelles substances pour résoudre le mystère de la nuit, son organza.
Ce matin-là, la pluie offre à la lecture son article original
On fait l’éloge de moulins à vents en ailes de taffetas
Elle démontre quelque chose de digne en aval,
Fouettant le visage du portrait sur le mur, juste comme ça.
La bruine de mai a un goût rare, la douceur du satin,
Celui des conversations entre amis, dans le calme des flots naissants.
L’essence d’une goutte de rosée, la plus pure, celle du lendemain,
L’énigme philosophique court du noyau du soleil au germe des chuchotements.
***
REPERTOIRE
L’affection en mystère
Une coopération réussie
Un miroir tranquille
Intermédiaires.
Une façon d’être
Laisser sa marque
Le sens des symboles.
Enseignements.
Trouver les mots
Le sens de toute chose
Un travail extérieur
Hyperpoésie.
Un départ parfait
De tout son cœur
Une radieuse simplicité
Existences.
Des doutes qui tombent
Le but à atteindre
Vouloir recommencer.
Extrême-plan.
***
COSTUME
Une roue, un sourire, un dilemme, un chariot
Avoir conscience que l’on soulève le voile de crêpe bleu
Une assurance, un sentiment, un carnet de souvenirs jeté à l’eau
L’apparat magnifique d’un sourire heureux.
Vous ferez cela pour moi, en fiacre de cérémonie,
Jouant un rôle dans cette scène à l’aplomb du rideau rouge
Les doux velours d’un tel tableau jusqu’à ce que le cœur s’arrête, une insomnie,
Des murmures, un halo de lune dans le ciel, le pont de pierres qui sonne, qui bouge.
La quête de l’autre en costume pour dire oui
La main gantée de la toute prochaine mode
La promesse éperdue, fière, émouvante, un pari
Le café est si bon ce matin, son bouquet, l’antidote émeraude.
***
LE REVE D’UN OISEAU
Le rêve d’un oiseau, c’est de devenir devin,
Avec des bûchettes bien alignées, il veut connaître demain,
S’il sera blanc de silence, ou de toutes les couleurs pour pouvoir chanter,
Ou bien rouge chaud, pour prendre son envol du haut de son grenier.
Humer l’air de Paris en semaine, ou celui d’un dimanche à Provins,
Quand vient le temps de survivre en campagne, il se souvient,
De la camomille et des roses, savourer leur goût, leur parfum,
Pour battre gaiement des ailes, contre la montre, en chemin.
Attendre en chœur la fin de l’hiver pour discourir enfin,
Savourer divinement les graines d’un nouveau matin,
Dissoudre dans l’eau claire du souvenir, le froid, le gel, la faim,
Pour hors du temps, dans l’apothéose des heures, savoir où se cache Merlin !
***
C’EST QUOI, UN SOURIRE ?
Le regard en sourire, illuminé, loin de la norme statique,
Il se bâtit en secret, jamais offert sur un plateau,
Il crée des séquences, un vrai découpage de générique,
Joue tous ses as au dernier pli, sage comme un renouveau.
Sourire n’est pas rire, cela fait cinq cents ans qu’on le traduit,
Cette énigmatique variété d’expressions, non calibrées, toujours franches,
Douces comme le vent dans les blés, ou l’oisillon dans le nid,
Un devenir de Joconde, une invitation à prendre la main, ou se poser sur la branche.
Le regard en sourire n’a pas besoin d’œillères ni de lorgnettes,
Ni d’une pomme rouge pour amadouer les belles,
Il capte les notes irréelles, de l’autre, toute la palette,
De sentiments dévoilés, loin de l’apparat et des grimaces de demoiselles.
Sourire n’est pas rire, certes, alors c’est quoi ?
Une astuce de la physiologie pour voir les traits se calmer,
Poser dans un rictus renouvelé, l’espoir, la tendresse et la joie
Pour jouer la vie, loin des cris, avec un piano aux touches colorées.
***
NOVEMBRE
Novembre ne s’exprime pas en fleurs de gala,
Il reste au foyer, loin du froid des pays sauvages,
Obligé par les pierres à braver le premier gel sur le verger, le verglas,
Pour revenir, chanceux, à la prochaine semaine qui prend de l’âge.
Il choisit sa respiration idéale, sélectionne ses brouillards,
De la douce nature que lui impose sa baie, au calme,
Parle avec liberté des jours lumineux, des amis, de leur histoire,
Pour laisser transi, le temps, et ses dimanches, et les humeurs de la brume, sa dame.
Novembre gagne toutes les batailles, celles des prairies d’avant l’heure de la mer,
Celle des yeux qui lisent au seuil des portes ouvertes,
Celle qui invite les étoiles dans le quartier des ombres, rayonnant comme l’éclair,
Pour combler le monde et ses mystères, en un ressac ultime, la terre entrouverte.
Il sait ouvrir la faille, dessiner l’intuition de l’espoir,
La capitale des ciels l’accueille dans ses maisons,
Les mots imprimés qui voguent vers l’hiver, sans boussole, sans miroir,
Marmonnant que la mémoire est difficile, que douce est la chanson.
Où est allé Novembre, disparu, cette année encore ?
Les pierres du château pleurent son unique tempête,
Demain un soleil pas comme les autres accompagnera de son aurore,
Les voiles blanches en plein ciel, joyeuses organisatrices de la fête.
***
RUBANS
L’île minérale suit des lignes irraisonnées,
Elle accueille tous les voyageurs de son plein gré
Les paysages du jour donnent naissance à d’autres rocs, animés,
Par leur mémoire, ils célèbrent les collines bien arrimées.
Le ruban vert du couchant en aventure,
Noie les villages dans de nouveaux golfes ouverts,
Les vagues s’ébrouent en gouttes, en littérature,
Pour contenir le soleil, ses fêtes de couleurs, balnéaires.
Des pierres à la mer il n’y a qu’un pas,
Que le vieil or franchit à chaque révolution
Le vent et la neige par-delà l’attente, toujours lauréats,
Vois, comme le temps passe, fixe le double horizon.
Le ruban rose nous fait penser à toutes les choses,
Qui veillent avec respect aux printemps, aux nouvelles lunes,
Apostrophant l’océan, et les lacs, les poèmes que l’on compose,
Pour écrire à la mer, dans l’instant, la main nue sur la dune.
***
LA MAIN
La main en silence est bonheur à méditer
Une générosité routière, des pins sur la contrée
Un oiseau captif relâché, un aigle dans la forêt,
Une fois-là, elle se pose et oublie le voyageur,
La fatigue de ses veines ôte la couleur,
Savoir attendre la ville, le royaume de sa candeur.
La main en silence joue stylo, plumes et pinceaux,
Au bout de la route, du verger à la ville d’en haut,
L’été sucre en parfum de rayons d’or, les paréos,
Une fois-là, elle dit « Viens avec moi »
Jouer ou croire, en toute modestie, montrer le temps du doigt
Même si cela ne se fait pas, l’espérance est une merveille, une joie.
La main sait passer le temps et parvient toujours à l’aube,
A transformer les paroles en mots, en choses, les fleurs en jardins, l’unité en globe,
La neige se perd dans le ruisseau, se cache dans sa nouvelle robe.
Une fois-là, elle regarde posément,
Du cheval sur la lande, le toujours lent déplacement,
Et son reflet dans la mare, intensément.
***
QUE FERIONS-NOUS SANS ESPOIR ?
Que ferions-nous sans l’espoir ?
D’un doux safran qui conduit sans y penser vers le bord de la mer,
De galets sur la dune, points de repère, cailloux de Petit Poucet,
D’un arc-en-ciel tel un chandelier, avec une plume qui pointe vers le ciel,
De colonnes en trilogie comme un temple de la Reine.
Que ferions-nous sans l’espoir ?
D’une chaise qui invite, d’une couverture qui protège du froid sur la terrasse,
D’un balcon du repos, s’y asseoir, sans pendule, avec vue sur le bois,
D’une invitation à œuvrer pour couvrir tous les médaillons d’or,
D’un simple signe du cerisier en fleurs pour rejoindre l’île de Molène.
Que ferions-nous sans l’espoir ?
D’une ancre en forme d’équerre pour prendre la mesure du fond,
D’une librairie avec ses livres reliés de jade pour y apprendre toutes les langues,
D’un triangle qui sonne et chante d’un simple geste de la main,
De la raison comme règle de trois pour comprendre les épicènes.
Que ferions-nous sans l’espoir ?
D’une côte à perte de vue, d’une vague pour balayer les mots,
De bateaux que l’on compte dans le paysage au soleil d’un matin,
D’outils de mémoire, d’objets de souvenirs, pour bâtir et construire,
D’une source moderne en points de suspension, sans équivoque et sans peine.
***
LA CITE DE LA MER
La cité de la mer ouvre sur toutes les merveilles
Regard sur l’éternité, surprises au coin de la rue,
Occultant la raison pure, osant prolonger le sommeil,
Elle joue sa nature, poésie sans désert, en quête d’absolu.
L’arbre serein nous accueille en haut de l’escalier,
Des rochers jouent sans lui l’offre et la demande - de repos,
L’esprit libre, les vagues quittent leur source pour le déjeuner,
L’eau vivre, le long des chemins, coiffe le soleil de son chapeau.
L’espoir du quotidien en ces lieux, en cette Polynésie,
Le premier soir incertain, on y croit à nouveau,
Le temps ensemble, celui du silence de l’île Tudy,
Un équipement sans argenterie, une photographie jaunie, loin de Landerneau.
Sur terre et sur mer, demeure le livre d’heures,
Une bibliographie riche en liens comme une filature,
Un parcours en panorama d’une tour de guet à son élévateur,
L’air du temps, les calendriers, la main et son esprit en aventure.
***
LA PHOTOGRAPHIE
La photographie se préfère en version précieuse,
Les nombres en clair pour dire que le temps est venu,
Soutenir les images du poète sur le pas de la porte venteuse,
Rendre son monde moins effrayant pour rire dans les rues.
Tu as bonne mine sur la photographie,
Elle dit de se lever, la nuit est nouvelle,
Pour voir de près, la perle bleue, sur le pont, de la pluie,
Place du Trésor, les étoiles se gravent en relief de ciel.
Devant moi , la photographie, une scène au cœur de mes mains,
Les étapes sont validées, on tourne la page des bribes d’exil,
Tissées à l’usine du canal, une trame pour demain,
Une palette de quelques mots, les yeux ouverts, en équilibre sur un fil.
***
L’OBJET
L’objet de tous les mots, le jour de la révélation
Niche en trouvailles dans son arbre le plus haut, bien au chaud,
Semblable à l’or dans un coffre oublié au cœur des traditions,
Dans un souffle du soleil, le regard vague perdu sur l’horizon.
L’objet de tous les rêves, bouquet d’aubes cycliques, un accueil à soi-même,
Tant de trésors, d’ombres d’étoiles, une identification,
Dans les rues sans suite, il trouve la porte des champs, la bohème,
Un ruisseau généreux, le ciel en grand, une impulsion.
L’objet de tous les temps, chaleureusement calé, régulier en intervalles,
Associe les arbres verts aux chênes géants, poliment, leur tenant la main,
C’est presque le même mot que l’on entend, comme un secret que l’on balaie,
Contre le soleil de la presqu’île, le sommaire d’un nouveau roman - qui paraîtra demain ?
***
LE TEMPS ROMANESQUE
Le temps romanesque tire en une traction secrète, un objet bizarre
L’idée d’un voyage, souvenir des années tranquilles
Qui allait au bord de la mer, dans un jardin à l’anglaise, au hasard
Farfelu, sauvage, joyeux, plein d’humour, indocile.
Le temps romanesque s’épanouit en herbes folles, en dalles colorées, en mosaïques anciennes,
Un arrosoir danse de Nottingham à Bristol, de l’entresol à l’envol,
Un rossignol joue son théâtre de rue, il en a le monopole, depuis Diogène,
Il sait compter les fumeroles de la jachère, nature en suspense, il connaît les symboles.
Le temps romanesque dépose sur l’automne son étole, sa marque du temps,
Tant de livres et dans ces pages les prémices d’un changement
Une chambre à soi, l’âtre de l’autre, l’antre à sa place, en guise de parasol,
Un refrain dévoilé, une plongée sous-marine, fier du gaillard d’avant.
Le temps romanesque nous fait revenir sur scène,
Pour jouer pile, le rôle de la sirène dans son unique gestuelle,
Avancer dans la vie, inconditionnelle, l’enfance en son harmonie même,
Et savourer avec emphase, l’unité des cadeaux en kyrielle.
***
REMARQUE
Remarque, le clan des pinceaux joue tout sur le tapis,
Même s’il ne reste qu’une feuille de chêne, un coupon de Liberty,
Une brume de miel pour ne plus réfléchir le cottage endormi,
La parcelle temporelle d’un cap, d’une dune, ou les rues de Paris.
Remarque, la citadelle blanche a donné son adresse à l’horizon,
C’est son grand palais qu’elle achève, tel le roi sa chapelle de l’Ascension,
Les hirondelles sont tenaces, elles reviennent toujours, pimprenelles à l’unisson,
Volant natives en pays de connaissance, loin de toutes les abstractions.
Remarque, le bocage converge en courage, la marjolaine s’élève vers le ciel,
Emerveillés d’un vivant essentiel, de la vie en sommeil,
Les visages en porcelaine, gravés à jamais dans le vermeil,
Sous les pinceaux alertes, encouragés, allègrement, essentiels.
***
AUTOMNE D’ASIE
Automne d’Asie dans son ambiguïté
Quand les adeptes des images s’offrent de l’inédit
Marchant de Morgat à la brume vers les vitraux sacrés
Un panorama sous les pieds en guise de tapisserie.
La bibliothèque des voyages à l’honneur
Quand les portraits s’incarnent en porcelaine,
Il est temps de quitter les mouvements d’humeur,
Pour le Népal, et ses hauteurs à perdre haleine.
Automne d’Asie, naturellement, une conception éternelle,
Quand en moine on observe le phénomène,
De l’arrêt des pendules, de la course sempiternelle,
Pour poser le temps, comme on dépose les chaînes.
***
REVE
Endormie au clair de la lune,
Elle rêve d’une cathédrale,
D’une colombe dorée, d’une rosace en épi de blé.
Perdue dans une chambre sans lune
Elle détruit les colonnes
D’un temple oublié, au pied du village, d’une prière étoilée.
Silencieuse sous son toit de lune,
Elle fuit les ombres,
D’un Paris sans pluie, sans réverbères, sans cheminées.
Morte dans une chambre, pleure la lune
C’est le matin, elle quitte son ciel,
Sans regret, sans semonces, sans amertume
Tout doucement, d’un pas mesuré.
***
UN BUREAU A SURPRISES
Un bureau à multiples surprises, c’est le clou de la donation : en palissandre de Rio, avec table à dessin et trois tiroirs en ceinture,
De bilans positifs en manuscrits grimés, il porte l’histoire de la famille avec ses coins ajourés, ses ornements, ses armatures,
La collection sans concession de stylos, de plumes, de coupe-papiers, alourdit les coffrages, charge les rails, participe à l’usure,
L’invitation au voyage intérieur, embarcation statique, stratifiée au Brésil, domiciliée à Saint-Gournay, assemblée à quelques encablures,
Cette semaine à Paris, il quittera le catalogue de la vente des Geoffroy, tout comme les rares sculptures,
- des maîtres anciens - oubliées dans quelque grenier frigorifié, derrière le silence des murs,
Panorama de deux cents ans animés de modelage, de peinture, de quête en écriture,
Le trompe-l’œil en beauté cachée, comme les secrets de ce bureau à multiples surprises, en murmures.
***
LE JOUR EST PRESENT
Où trouver la meilleure cachette en ces lignes ?
Pour oser dire que le monde est bon, que nous sommes tous liés.
Du flux du cap, à la mardelle à la croix, au muret qui souligne,
En latin de chiffres ou en langue de métiers.
Partir de la vie, un matin de soleil sous le cristal,
D’un ciel d’où l’on voit le bon côté des choses,
Laisser sur l’échiquier les adages, les feuilles, les timbales,
Et prendre la rue qui tourne, bâtisseuse de la dernière osmose.
Le travail consiste à poser les mots, limitrophes,
En une mosaïque imprimée, immobile, une pièce unique,
Trouver la lumière de la première à la dernière strophe,
Et sur l’embarcadère, signer joyeux d’un astérisque.
La meilleure cachette existe en nous, échos de partout,
Fenêtres sur la vie, sur l’éternité, sur ici,
On y trouve des diamants, des curiosités à cent sous,
L’art, c’est la réponse, c’est le sésame, sans encyclopédie.
***
VOYAGE EN TEMPS SEREIN
Pourquoi ne pas partir de ce ruisseau, de cette eau fraîche
Prendre la Rue de l’Image et s’arrêter au fronton,
Séjourner à l’ Hôtel des Parfums, graver à la pointe sèche,
Son amour de la vie, sa station immobile, au ponton.
Contempler le temps qui passe, le vrai, le serein, comme une cérémonie,
Claire comme le faisceau du phare dans la nuit,
Au loin, le bout du monde peint l’azur en bleu,
Se perdre Rue de Seine, voir scintiller la ville, un camaïeu.
Composer un voyage d’agrément sous un soleil nocturne,
Savourer le nectar nouveau, la perle des vieilles lunes,
Son nom brille comme la lanterne de la lagune,
La ville à portée de voix, antique conférence de fortune.
***
BAUME DE PLUIE
La pluie aime discuter avec les vagues,
Elle y trouve des idées, la source de son présent,
Elle lui chuchote ses idéaux de croisière, lui raconte des blagues,
Surtout hors-saison, quand le panorama s’estompe, médusant.
La pluie aime du ciel sa lumière blanche,
Celle qui inonde le cap et irradie les forêts,
Des lacs, des étangs, elle parle à travers les branches,
Et bâtit une architecture de gouttes longues, des galets.
La pluie savoure le calme, pose des onguents, des baumes de gala,
Elle joue l’instant au milieu des tournesols,
Accompagne les hirondelles, de la Rue des Carmes au grand acacia,
Et s’évanouit dans l’esprit du temps, quand le soleil monte du sol.
***
BOUSSOLE
Un bijou en forme de boussole, pour aller d’un point à un autre,
Si on passe par le point de départ, on sait toujours se repérer,
On tire au sort la lettre de son choix, une feuille de route, surtout la nôtre,
Pour contourner l’arbre en fleurs, puis de la côte, prendre le sentier.
Au bord de la falaise, surtout s’il pleut,
Faire une prière à la multitude, l’âme en costume,
Garder à la main son panier de sable bleu,
Et lever le nez vers les nuages, un dialogue à la brume.
Faire la courte échelle pour atteindre la lune,
Dorant les épis célestes d’une villa en vermeil,
Souhaiter la protection des affluents, des lagunes,
Dompter la nuit en une nef médiévale et trouver le sommeil.
Un séjour prestigieux en cet être-là, quartier de l’Espérance,
Un voyage à Rome, ou à l’époque médiévale,
Rencontrer un linguiste, un luthier, un agent de la science,
Choisir d’écrire en lettres grecques, le jour de la fête immémoriale.
***
L’ECRIVAIN D’ARGILE
La place du marché joue le chant de l’alouette
Portant un rameau de croyances, brillant et doré,
C’est le printemps, elle songe à une pause, jouer des sornettes,
Elle est reconnaissante de ne pas être née avec des plumes bleues.
Celles que l’écrivain, dans son décor de murs peints,
Trouvera sur son lit, les yeux rêvant au cadran,
L’afflux d’élixir emplissant sa tête, brûlant ses mains,
L’été est là, la lumière est magnifique, bienheureux son talent.
Le plus beau livre de sa vie, il l’exposera dans la maison de bois,
Les mémoires du canal rendront son temps poétique
Au carrefour de ses jours, contre les lilas, le souvenir en croix,
Il s’épanouira à regarder ses rêves capturés, amnésique.
En toute saison, jusqu’à la fin, il apostrophera demain,
Il regardera d’où il vient, du sud vers l’ouest parisien,
L’horloge du marché aux fleurs sonnera en vain
L’argile dont il est fait rencontrera son destin.
***
LA PIERRE ANGULAIRE
Libre comme la statue gourmande du onzième
Fière de sa conquête boréale, de son épanouissement,
Au coin des toits, ménagère, animal totem,
Elle se voile les yeux de rosée, craint l’éblouissement.
Elle se vit au coin du feu, en reflet dansant dans les ombres,
Au loin, une plaine de passage, paisible,
Au-dessus, un quotidien de nuages blancs, en nombre,
Longtemps après viendra le repos, invisible.
Des pulsations sages auprès du seuil chaud
La perle rare écoute les bruits du village
Au même endroit souffle la plénitude de là-haut,
Elle rêve de frontière, de pôle, de mirage.
Mais la pierre angulaire ne voyage pas,
Elle tisse des liens forts, inamovibles,
Se pense colombe ou colombine, en robe d’apparat,
Ancrée à l’édifice, dôme au langage intraduisible.
***
QUESTIONS DE VIE
C’est à la vie qu’on a affaire
Dans cette escapade authentique, compagnons de la réalité,
Quelle heure est-il ? demande le commanditaire
Il oublie la question et plonge dans un vase, un bouquet.
Avant de partir, de nous raccompagner,
Il scrute le réverbère au pied de l’église,
Près de la maison aux glycines, comment expliquer ?
Il refuse la réponse, tournant la chemise.
Comment expliquer qu’on se perde dans l’escalier de marbre ?
Au pied de l’horloge en ferronnerie, ou sur le seuil de la porte bleue ?
Appartient-on à la vie, comme les racines aux arbres ?
Il nie la question, arrive ce qui doit avoir lieu.
De la fenêtre à carreaux gris, on voit la neige tomber
La course dans les blés d’or est vieille de cent ans
A-t-on le choix ? On n’y peut rien changer ?
Il élude la question et sanctifie le présent.
Voilà le fond de l’histoire, gardiens de tous les bonheurs,
Le mystère à vivre naît-il dans l’oratoire ?
Une pierre levée pour prendre de la hauteur,
Il retourne la réponse, et nous laisse écrire l’histoire.
***
LA TERRE DE SARNIA
L’âme humaine responsable choisit toujours sa bague,
L’attention dans sa désinvolture lui fait front
Au petit matin, l’air est toujours vif sous les vagues,
Cette poésie atypique nait de ce château en partition.
La rivière fête son anniversaire, terre est sienne,
Elle exprime dans une pluie d’étoiles son cours révélateur,
L’astre est jubilatoire sur les nuages, fi des pluies diluviennes,
Restituer une vérité toponyme en relief intérieur.
A l’abri des tempêtes, on pense de l’intérieur,
Toute latitude en cadeau cependant, un trait d’union,
Laissant parler son cœur, on ne peut se tromper,
Embruns justifiant la halte sous le rouge cabanon.
C’est le nuage du temps qui couvre la terre de Sarnia,
La limite de la zone d’ombre s’arrête au coin du sable,
Le sens réel de son heureux tempérament, un vague incarnat
A l’écart, un peu loin de tout souvenir qui accable.
Un été, vite emporté, latent, éternel.
***
LA PURE EXPRESSION DE L’AVENTURE
La pure expression de l’aventure
Est-ce partir d’un jeu de couleurs ?
Est-ce naviguer comme l’oiseau voyageur ?
Seule la rue de l’horloge ouvre toutes les serrures.
La pure expression de l’aventure
Est-ce séjourner au bleu de l’atoll ?
Est-ce baigner dans les herbes folles ?
L’échelle rose ne souffre d’aucune armature.
La pure expression de l’aventure
Est-ce prendre une forêt de mâts pour horizon ?
Est-ce connaître les ponts d’observation ?
Le bijou du chemin n’impose aucune imposture.
La pure expression de l’aventure
Ce n’est pas ouvrir le cœur des boussoles
Ce n’est pas considérer la puissance des auréoles.
L’antique trianon offre toues les villégiatures.
***
L’EXPLORATION POETIQUE
Entrer en poésie
C’est un cadeau de l’étoile polaire
Un trésor d’intentions de la galaxie
Une navigation en invention temporaire.
Entrer en poésie
C’est un bateau de corsaire, une voile sur le pont
La conception champêtre de toute académie
Le vent portant du Sud sous les ballons.
Entrer en poésie
C’est voguer sur des diamants
Trouver le pôle en toute flânerie
Sobre chemin de l’éxplorateur estivant.
***
ENFANCES
Une lampe à suspendre les bougies
Une rose à la goutte endormie
Une bobine, un serpentin, un anneau de féérie
Les cartes et les dés de l’enfance en survie.
Un papillon, un poisson des ailes sans âge
Des nageoires à la maison, un bosquet dans les nuages
Le tableau souple dialogue avec les sages.
Une barquette sur le ruisseau de sable
Un dîner à la fenêtre, vue sur l’érable
L’automne a mis son costume de vénérable
Un chapeau de miracles sur le ciel véritable.
***
Muriel CAYET 2016-2017